Ariosto Furioso


Dans la catégorie « exhumations » de la PàL, je pense que je détiens ici l'un de mes doyens à travers ce livre... Si j'en crois la date que j'ai portée sur sa page de garde, Ariosto Furioso était en souffrance de lecture depuis 2004. C'est à dire, assez peu de temps après le moment où j'ai commencé à dater mes livres.

Résumé :
En 1533, l'Italie a réalisé une bien précaire unité, sous la houlette de Damiano de' Medici. Tandis que Savonarole et ses partisans, exilés en Allemagne, ont compliqué les guerres de religions qui opposent catholiques et luthériens, l'Espagne a été mise à l'index par l'Eglise. L'Angleterre et la France ont les mains liées : l'Italia Federata est jeune et fragile, mais les navigateurs gênois ont, sous sa houlette, commencé la conquête du Nouveau Monde... Lodovico Ariosto, le poète, est l'ami du Premier de' Medici, l'un de ses seuls soutiens dans la ville de Florence où les complots succèdent aux intrigues de cour. Lodovico aimerait pouvoir aider son ami Damiano dans les tumultes politiques de l'Italia Federata, mais il se sent impuissant face aux puissantes forces centrifuges représentées par les rivaux de Damiano, les Etats fédérés mécontents et le pouvoir colossal de l'Eglise. Alors, il se réfugie dans sa Fantasia : une oeuvre poétique où le poète est aussi un héros, parti pour le Nouveau Monde où il va défendre les amérindiens alliés de l'Italia Federata contre un sorcier aussi abominable que sournois... La bataille que Lodovico va livrer dans sa Fantasia, écho de celle que Damiano mène dans la Realta, peut-elle être victorieuse ?
Il s'agit d'une uchronie où l'arrière-plan historique est somme toute assez peu important. Certes, la divergence historique est de taille, l'Italie n'ayant réalisé son unification qu'au XIXème siècle, mais l'auteur n'en tire qu'assez peu de conséquences. Dans ce monde où l'Espagne est sur la touche, l'Italie joue un rôle assez comparable, et le point de divergence exact reste mal défini. On en reste donc un peu sur sa faim de ce côté-là.

Par ailleurs, le procédé narratif reste assez simple voire simpliste : chaque passage de la "Fantasia" est suivi d'un passage de la "Realta", puis on recommence au début... Je vois mal comment l'éditeur peut dire que les deux trames narratives se rejoignent (voir la quatrième de couverture). Ou alors, il faut trouver quelque subtilité très subtile dans l'évolution de l'intrigue entre les deux histoires : sans doute l'auteure a-t-elle voulu donner l'impression que l'évolution de la "Fantasia" suit celle de la "Realta", mais je n'ai pas bien su voir le lien entre les deux. Faut-il y voir un hasard si l'éditeur, sur la même quatrième de couverture, dit en somme que le procédé serait "dickien" ? Dans la mesure où je n'accroche pas bien à Dick, l'explication serait toute trouvée... Je suis donc resté sur ma faim aussi pour cet autre aspect du bouquin. Le sorcier "chasseur de canards" serait-il une métaphore d'une Eglise qui est restée traumatisée, mille ans plus tard, par le césaropapisme ?

Que reste-t-il en fin de compte ? Eh bien, pas grand-chose. C'est distrayant mais sans plus, et je dois dire que je vois mal pourquoi ce livre est paru dans une collection de SF puisqu'à part l'argument uchronique initial, il n'y a pas de SF là-dedans... L'intrusion, dans la "Realta", d'un certain nombre de personnages historiques (je pense à sir Thomas More, chancelier de Henry VIII, connu surtout pour avoir écrit L'Utopie et fini décapité), vient agir comme un rappel périodique de cet argument sans jouer de véritable rôle. Je ne doute pas que des références littéraires et poétiques m'ont échappé, Ariosto étant lui aussi un personnage historique... A mon avis, ça ne risque pourtant pas de m'avoir donné une fausse impression, et de m'avoir fait prendre une oeuvre exceptionnelle pour un bouquin décevant. Façon de dire que je n'y reviendrai sans doute pas...

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