Elysium

Je n'avais jamais vu District 9, même si je m'y étais intéressé au moment de sa sortie. A la faveur d'un après-midi pluvieux à Valence, je suis pourtant allé voir ce film sous-titré "par le réalisateur de District 9", alléché par un résumé plutôt accrocheur : qu'allait donner cet Elysium ?
Résumé : 
En 2154, alors que la Terre est en mauvais état du fait de la surpopulation et de la pollution, la station orbitale d'Elysium fait office de véritable paradis réservé à l'élite - c'est-à-dire, les plus riches. A bord d'Elysium, les citoyens disposent de superbes propriétés mais surtout de médi-pods les mettant à l'abri de la maladie et peut-être même de la mort. Sur Terre, le petit peuple n'a presque aucun droit, terrorisé par la milice des droïdes, cantonné au désespoir et au spectacle éblouissant de l'orgueilleuse station orbitale... Max est un repris de justice, qui travaille dans une usine de droïdes afin de se ranger une bonne fois pour toutes. Hélas, un accident de travail va le condamner à replonger : quand après une sévère irradiation il ne lui reste plus que cinq jours à vivre et que son seul espoir est de violer avec succès la frontière d'Elysium pour atteindre un précieux médi-pod, il va devoir entrer dans la combine d'un hacker de génie qui souhaite s'emparer des données qu'un milliardaire élyséen porte dans son implant cérébral. Ce que ne savent ni Max, ni son commanditaire, c'est que leur cible préparait un véritable coup d'Etat. Plus d'une faction va vouloir s'emparer du dangereux trésor de Max : aura-t-il le temps d'atteindre Elysium avant de mourir ?
Pièce de cyberpunk très bien caractérisée, ne serait-ce que par les choix graphiques opposant les citoyens élyséens très (trop) propres sur eux aux culs-terreux terriens bien crasseux et tatoués, ce film parvient pourtant à prendre une certaine distance avec le célèbre modèle incarné par Bienvenue à Gattaca. Point de dictature génétique, ni de dictature temporelle comme dans Time out : ici, l'ennemi apparaît sous son vrai visage, c'est-à-dire celui d'un pouvoir d'essence capitaliste ayant fait le choix décidé de l'apartheid. Pour une poignée de citoyens élyséens, une horde reste cantonnée sur une planète Terre poussiéreuse où elle construit les profits de l'élite à la force de son labeur et de sa souffrance : le héros, sur la tête duquel pèsent plusieurs sentences de mort émanant toutes des maîtres d'Elysium, incarne ici bel et bien les damnés de la Terre dont il finit par devenir (malgré lui) le bouclier.

Le cyberpunk se caractérise souvent par la présence d'un héros - ou d'un groupe de héros - devenant le grain de sable dans la machine trop bien huilée du système, qu'il soit étatique ainsi que c'est le cas dans les oeuvres déjà citées, ou corporatif comme dans le Cycle de Cat le Psion de Joan D. Vinge ou dans la série Carbone modifié de Richard Morgan. Ici le système semble quelque peu différent de ces deux modèles : à mots couverts, on comprend que la Terre a été transformée en bantoustan. De ce fait, Elysium aurait tendance à se rapprocher - dans son seul schéma - de la dispensable trilogie Matrix où c'est l'espèce humaine toute entière, cette fois-ci, qui se trouve asservie par des machines intelligentes. A la différence toutefois du blockbuster philosophisant des Wachowski, Elysium ne cherche pas à s'aventurer sur les peu sûrs terrains du messianisme : ici, les élus sont déjà au paradis. Sauf que ce paradis est construit sur un cauchemar et que le type qui va foutre en l'air le piédestal des dieux est pour de vrai un type comme les autres. Et même, à tous les sens du terme, un pauvre type : le destin de Max est scellé depuis le premier quart d'heure du film et si l'on peut parfois se surprendre à espérer pour lui, on sait qu'il porte en lui son propre sacrifice.

La résolution de la tension accumulée au long de ce film se fait, en toute logique, d'une façon brutale et définitive. C'est avec une certaine surprise que l'on voit la solution émaner des bien peu asimoviens droïdes auxquels Max est presque aussitôt confronté. La conclusion d'Elysium, si elle semble à première vue pleine d'espoir, n'est cependant pas sans son lot d'incertitudes : que va-t-il se passer, dans cet univers où, désormais, les machines ont dans les faits pris le pouvoir ? Et surtout, est-ce une bonne idée que d'ouvrir l'accès aux médi-pods aux habitants d'une Terre déjà surpeuplée ? C'est dans ces questionnements finaux qu'Elysium atteint sa véritable dimension : au-delà d'un simple divertissement, il s'agit bien d'une oeuvre interrogeant sur notre propre époque et, au-delà, sur les travers de l'espèce humaine...

Voir aussi l'avis du Traqueur Stellaire que je lie les yeux fermés.

Commentaires

Efelle a dit…
Il est certain qu'on peut se poser plein de questions vu le côté naïf de la fin mais je n'ai pas boudé mon plaisir quant à ce divertissement efficace.
Anudar a dit…
Voilà : cela peut se lire à plusieurs niveaux et en général c'est la marque d'un film plutôt réussi.
Guillmot a dit…
Ha oui sur le plan du divertissement c'est efficace.
Anonyme a dit…
Que de gentillesse et de complaisance sur ce film: c'est normal d'être huper caricatural et manichéen au point d'avoir aucune nuance qui rend ambivalente et donc intéressante ce genre de combats riches/pauvres ? Un film assez faible sur lequel on pouvait attendre beaucoup plus question scénario, avec en plus ces gros méchants bas de gamme comme semble l'aimer le réalisateur. Matt Damon joue bien sur très bien, et Jodie Foster nous gratifie de phrases en français...et là par mauvais esprit, j'ajouterais presque que l'intention était de renforcer par ce biais son côté "méchant" (et la sorte de cicatrice distant "riche" sur la joue de l'autre français). La toute fin nous met carrément une incohérence en plein sur les mirettes, alors que d'habitude je ne regarde jamais un film pour questionner sa cohérence (contrairement à tout l'internet). Elysium est le premier film depuis que je vais seul au ciné pour lequel pour verdict fut assez vite limpide, mais avec regret, parce que je ne suis en plus ni un hater et un fan de SF (quoique la SF sociale hyper bateau à la manière d'un conte sans profondeur me déçoit: on peut faire mieux).
Anudar a dit…
Bonjour et bienvenue ici !

Bah, que veux-tu, je suis trop bon public sans doute. Après, on trouve toujours un moyen de justifier ses goûts...